18 juin 2009

Ils sont fous ces romands !

On assiste, ces jours-ci, à l’apparition dans les médias suisses d’un nouveau concept : la "romandicité " (pourquoi pas romanditude, d'ailleurs ?). Késako ? Selon certains, pour pouvoir succéder à Pascal Couchepin au Conseil fédéral en septembre prochain, le ou la candidat/e devra remplir une condition nécessaire (mais non suffisante : on ose espérer que la compétence en est une autre) : être romand.

Question : selon quels critères détermine-t-on qu'une personne est ou non romande ? Doit-elle fournir un certificat attestant de son authentique romandicité et depuis combien de générations ? Va-t-on instaurer un examen de "romandisation" pour pouvoir juger si quelqu'un qui n'a pas eu la "chance" d’être romand de souche (chasselas plutôt que de Riesling-Sylvaner) l'est devenu au fil des années passées de ce côté-ci de la Sarine ? Apparemment, le fait d’être né dans un canton romand et d’en avoir défendu les intérêts tout au long de sa carrière politique ne donne pas à Urs Schwaller un degré suffisant de "romandicité" au motif qu’il est issu de la minorité alémanique du canton de Fribourg. Son bilinguisme parfait, plutôt que d’être un atout, se transforme en un handicap. Curieuse conception de l’ouverture d’esprit pour un pays qui se targue d’être multiculturel et qui fait du bilinguisme, voire du multilinguisme, un de ses atouts ! Sans compter que le fait d’être lui-même issu d’une minorité linguistique rend probablement Urs Schwaller plus sensible à cette question qu’une personne issue d’un canton uniquement francophone. Mais il ne s’agit pas tant d’Urs Schwaller en particulier que d’une question de principe.

Evidemment, derrière cette polémique se cachent des intérêts purement politiques (en l’occurrence des rivalités personnelles plutôt que linguistiques). Mais, comme par hasard, ce débat intervient au moment même où certains milieux soulèvent "la question romande" (voir le livre de F. Cherix aux éditions Favre) et lancent l’idée de la création d’une nouvelle entité institutionnelle romande. D’ailleurs, la Suisse romande existe-t-elle vraiment ? N’est-ce pas plutôt une fiction à laquelle on se raccroche en ces temps difficiles où les identités nationales ou régionales sont mises à mal par la mondialisation ? Ne joue-t-on pas avec le feu et ne risque-t-on pas de provoquer un scénario à la belge ? Nous avons besoin les uns des autres : plutôt que de nous diviser, nos différences et nos divergences de point de vue devraient nous rendre complémentaires. Quant à moi, pour le dire plus crûment et moins diplomatiquement, je me sens nettement plus proche d'un citadin zurichois, bernois ou bâlois que d'un pourfendeur de loup valaisan ! Je le dis d'autant plus volontiers que, même si j'habite aujourd'hui dans une ville, mon pedigree est à la base plus agreste qu'urbain et que j'ai eu l'occasion de fréquenter les deux mondes.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire